" L'adieu d'un humaniste lyonnais... "
Jacques Moulinier DR |
Jacques Moulinier nous a quittés soudainement. J'ai tenu ce matin à rendre hommage lors de ses obsèques à celui qui a tant apporté à notre ville et pour qui j'avais plus que de l'estime...
" C’est avec une émotion que nous sommes réunis autour de Jacques Moulinier. Madame, Louise, Mathias, nous partageons ce matin votre douleur. J’ai accepté de dire ce matin ces quelques mots pour témoigner.
Pour témoigner de la qualité de l’engagement de Jacques. Pour témoigner de la profondeur de son humanité. Pour dire aussi que sa foi discrète mais profonde impressionnait même ceux qui ne la partageaient pas. J’ai connu Jacques lorsque je suis entré au conseil municipal de Lyon, en 1977. Nous siégions sur des bancs opposés mais, à l’époque, cela n’empêchait pas l’estime, le respect et même des sentiments d’amitiés.
" Lyon s’ouvrait sur le monde... "
Jacques était passionné par sa ville, par l’urbanisme de sa ville. Il devint adjoint à une époque où la préoccupation n’était plus simplement de bâtir à tout prix le plus de m² de bureaux, de logements, mais où commençait à émerger la conscience que faire la ville, c’était aussi faire émerger une nouvelle qualité du bâti, une nouvelle qualité des espaces publics. Bref, faire émerger la beauté pour tous dans la ville. Cette attention au bâti ancien et nouveau allait se traduire, par exemple, par l’adoption de ce nuancier de façade, qui sur les bords de Saône allait définitivement donner à Lyon une allure florentine.
L’urbanisme descendait dans le détail, il s’emparait de la proximité et en même temps, il entendait embrasser l’avenir de la ville dans une grande cohérence, pensant Lyon dans la globalité de son agglomération. C’était l’époque où se créait l’Agence d’Urbanisme autour de Jacques Rigaud, avec Bernard Rivalta, Maurice Charrier, Guy Fischer… Jacques Moulinier en fut le fondateur et un acteur majeur. Lyon s’ouvrait sur le monde, elle commençait à prendre pour source d’inspiration les grandes villes européennes et même les grandes villes du monde.
Je me souviens d’un voyage organisé par Jacques et l’Agence d’Urbanisme où, avec Jacques Rigaud et Jean Frébault, nous étions partis à la découverte des villes américaines de la Côte Est. New York bien sûr, mais aussi Boston et Philadelphie. Cela ne pouvait que donner l’envie de projeter Lyon dans une nouvelle modernité ! Et c’est ce qui se fit avec la requalification du centre-ville, la construction de la gare de la Part-Dieu, celle de Gerland autour de la première Ecole Normale Supérieure. Lyon décidément prenait une autre allure.
" Rien de ce qui est humain ne lui était étranger... "
Jacques s’épanouissait dans cette tâche qu’il menait avec la volonté de trouver les plus grandes convergences, dans une volonté de dialogue avec tous ceux qui n’appartenaient pas à la majorité. Je dis "n’appartenaient pas à la majorité", parce qu’avec lui on ne pouvait se sentir vraiment dans l’opposition. C’est que Jacques était un homme qui cultivait la nuance qui ne pensait pas que d’un côté se trouvait la lumière et de l’autre les ténèbres, qui pensait que les ressentis de l’aune humaine que la complexité des questions de société se satisfont pas de raisonnement schématique.
En fait pour reprendre la phrase de Terence : "Rien de ce qui est humain ne lui était étranger", il l’avait montré à la fin de la guerre d’Algérie. Il le montrait avec ses collègues, avec la minorité di conseil, il le montrait dans son dialogue avec les Lyonnais, cette ouverture à l’autre, il la puisait dans sa foi. Sa croyance en rien était aussi, était d’abord une croyance en l’Homme, chez l’autre. Il avait toujours un frère en Dieu même si son Dieu pouvait être différent.
Et puis alors qu’il était dans l’âge mûr, il y eut Madame, votre rencontre. Votre présence illumina la vie de Jacques. Il était désormais comblé. En souvenir du voyage à New York, que nous avions fait ensemble et qui avait été pour moi un éblouissement, je décidai après mon élection d’organiser mon premier voyage dans cette ville. J’y invitais naturellement Jacques. Pendant que nous parcourions les rues de New York, il nous parlait de vous, Mathias, Louise avec tendresse, avec émotion.
C’est ces images-là que je garde à l’esprit, au moment où je vous parle.
Adieu Jacques ! Tu vas manquer à ta famille, à tes proches. Tu vas manquer à ta ville aussi. Notre engagement est que dans notre action nous nous inspirons encore et encore de la vision humaniste qui était la tienne. Toi , tu auras marqué ta ville comme tu auras trouvé ta place dans le cœur des Lyonnais."
3 commentaires:
Oui c'est important de saluer un humaniste qui ne partageait pas une vision socialiste de la société , mais a toujours été un élu engagé pour le mieux vivre ensemble.
Simone
adieu Jacques.
Je ne connaissais pas personnellement Jacques Mouligner mais on m'a toujours dit beaucoup de biens de lui.
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